Notes d'un économiste

Denis Colombi et moi avons discuté de son billet sur l'absence de comics dédié à un public féminin (ou à défaut moins genré que les stéréotypes dominants). Comme nous différons assez profondément sur l'analyse, je ne pense pas inutile de développer mes arguments sur plus que les 140 caractères de Twitter. Mon argument central est donc le suivant : je pense que si les comics pour femmes n'existent pas, c'est que la demande solvable est trop faible.

Pour ceux qui ne le sauraient pas encore, je rappelle que les Presses Universitaires de Chicago offrent chaque mois un ebook gratuit.

Après avoir dit tout le bien que je pensais de l'ouvrage Mainstream ici et là, la troisième partie de cette note est destinée à exprimer toute ma frustration à l'usage de la version numérique de l'ouvrage.

Avec beaucoup de retard sur sa sortie, j'ai enfin lu Mainstream de Frédéric Martel. Ce ouvrage est le fruit d'une vaste enquête sur la culture de masse au niveau mondial, avec comme fil directeur le double objectif de comprendre pourquoi seuls les États-Unis semblent capables de produire des contenus rencontrant un vaste succès au-delà de leur frontières et de voir si d'autres lieux de production pourraient concurrencer ce qui est perçu comme une hégémonie culturelle américaine. Exploitant 1250 entretiens avec les acteurs essentiels des industries de contenu, Frédéric Martel apporte une réponse décalée par rapport aux analyses usuelles de la situation. Selon lui, le succès des contenus américains, qu'il s'agisse de Spider Man ou du Da Vinci Code ne tient pas à la poursuite d'une propagande culturelle, mais à l'efficacité d'un secteur économique qui cherche avant tout le succès, quitte à gommer les éléments d'identité ou de valeurs américaines. Inversement, la volonté de d'utilisation des industries de contenu à des fins de promotion d'un modèle ou de valeurs qu'on constate dans les groupes de médias émergents se heurte à la nécessité pour eux d'adapter les mêmes méthodes que celles des américains et donc de composer avec les valeurs qu'ils entendent promouvoir.

Un billet des étudiants de l'IPJ, repris par Owni, me semble illustrer les mouvements à l'œuvre dans l'édition (hat tip à @SoBookOnline).

Le dernier en date des plaidoyers pro domo d'Antoine Gallimard dans les colonnes du Monde a fait germer en moi l'idée que le numérique pourrait, au final, transformer l'édition dans le même sens que la Paramount decision avait révolutionné l'industrie cinématographique américaine.