Economistes, matheux et physiciens
Le statut des mathématiques en économie est un débat récurrent, surtout en France. D'habitude, les critiques viennent plutôt du côté des sciences sociales (voir les autistes). Alors, quand un ami physicien m'a dit qu'il s'interrogeait sur le rapport des économistes aux mathématiques, je me suis dit qu'il serait intéressant de lui faire développer son avis.
Son premier argument est que les économistes ont aux mathématiques un rapport caractéristique des matheux. Ce n'est pas vraiment étonnant, beaucoup d'économistes se recrutant parmi les matheux en quête de reconversion. Cependant, la critique de mon ami (appelons-le D.B.) est plus puissante. En substance, il dit que les économistes favorisent dans leurs études les cas à quelques agents (« pour avoir les intuitions ») ou au contraire à une infinité d'agents (pour se débarrasser des contraintes d'entiers). Dans la logique économique on met en avant des arguments de simplification de systèmes de toutes manières trop complexes, ou en se plaçant au niveau des faits stylisés, supposés limiter le problème des frictions. L'argument de D.B. est que ces cas permettent (et ce sont souvent les seuls où c'est possible) de parvenir à des solutions algébriques et à des propositions démontrables, souvent pompeusement baptisées « théorèmes ». Or, dans un monde scientifique formé aux mathématiques (celui face auquel les économistes cherchent à justifier leur crédibilité), ce mot a un poids considérable. Il permet de donner à l'énoncé ainsi baptisé l'importance logique d'un énoncé vrai, le plus souvent en oubliant les hypothèses sur lesquelles ils reposent. D'où la question que se pose D.B. : dans quelle mesure le formalisme mathématique sert-il d'artifice réthorique pour donner du poids à des énoncés chroniquement faibles (obtenus sous des hypothèses très fortes) et peu robustes à la modification du jeu d'hypothèses ?
Par opposition, les physiciens ont, me dit D.B., abandonné le fétichisme pour les solutions en closed form. Certes, la modélisation passe d'abord par une simplification du problème. Mais ensuite, on arrive à des questions dont l'intérêt réside précisément dans leur complexité. Là, un physicien n'abandonne pas faute de solution élégante, mais le lance dans les simulations numériques. Le sujet a déjà été signalé par Laurent Guerby en réaction aux difficultés d'Antoine Belgodère. Je me permets d'en remettre une couche. Une partie du mépris des économistes pour les simulation repose certainement dans l'importance accordée à l'élégance des résultats dans la formation mathématique. Une autre raison, qui me semble plus profonde, est que l'économiste est souvent réduit à quia quand il s'agit de calibrer son modèle pour faire les simulations. Pratiquement tout modèle comprend en effet un paramètre par essence inobservable, par exemple la propension à payer des consommateurs potentiels, ou leur goût pour la diversité. Dès lors, les valeurs initiales doivent être choisies au pifomètre, ce qui réduit la crédibilité des simulations.
Enfin, D.B. m'a dit qu'il lui semblait que la fixation des économistes sur les concepts d'équilibres traduit un certain retard par rapport à l'étude des systèmes dynamiques en physique, qui se développe maintenant en direction de l'étude de systèmes hors équilibre. Certes, il s'agit de la frontière de la recherche en physique. Mais il y probablement là quelque chose qui transpirerait utilement en direction de l'économie.
Le problème des mathématiques en économie est donc profond, et me semble révéler surtout les doutes des économistes eux-mêmes à l'égard des énoncés qu'ils sont capables de produire.
Publié le dimanche, mars 19 2006, par Mathieu P. dans la catégorie : Economistes - Lien permanent
Commentaires
lundi, mars 20 2006
00:57
Très intéressant billet. Quelques remarques :
lundi, mars 20 2006
13:12
"D'où la question que se pose D.B. : dans quelle mesure le formalisme mathématique sert-il d'artifice réthorique pour donner du poids à des énoncés chroniquement faibles (obtenus sous des hypothèses très fortes) et peu robustes à la modification du jeu d'hypothèses ?"
— vulgosSi même lui se pose cette question... Je suppose qu'il y a des économistes qui utilisent les maths à bon escient et d'autres qui s'en servent comme artifice réthorique. Ce qui m'inquiète, c'est que je n'ai pas l'impression de pouvoir faire confiance aux économistes matheux de base pour le tri et que je ne dispose pas des connaissances nécessaires pour le faire moi-même.
mardi, mars 21 2006
00:22
"Une partie du mépris des économistes pour les simulation"
— Econoclaste-SMCe mépris ne disparaît-il pas significativement depuis quelques années ?
Je le crois. Ce qui me rapproche largement de votre explication : la difficulté de faire de belles simulations.
Remarque en passant : quel commentaire fait un non économiste, scientifique de préférence, face à un modèle d'économie mathématique ? "Peuh... pas rigoureux et pas réaliste". Et quelle forme de remarque aura-t-il face à une simulation ? 'Peuh... pas rigoureux et pas réaliste".
Evidemment, on peut continuer à discuter avec les autres, comme DB par exemple. Pour les autres, chacun en fait ce qu'il veut...
"Enfin, D.B. m'a dit qu'il lui semblait que la fixation des économistes sur les concepts d'équilibres traduit un certain retard par rapport à l'étude des systèmes dynamiques en physique, qui se développe maintenant en direction de l'étude de systèmes hors équilibre."
Ne pensez vous pas que ce retard est sur le point d'etre comblé ? Quel est le nom de grand économiste le plus cité depuis quelques années, par exemple ? Les modèles de contagions, de réseaux sociaux, etc. sont-ils vraiment intéressants par leur état stationnaire ? La focalisation, j'allais dire "résiduelle" mais faut pas exagérer, sur l'équilibre n'est-elle pas due aux difficultés techniques à vraiment travailler sur la dynamique ? En regardant travailler l'économiste de base, j'ai vraiment le sentiment qu'il focalise là dessus parce que c'est le seul truc que le rapporteur va vraiment lire.
Par ailleurs, il y a une culture du hors équilibre qui ne demande qu'à revenir sur le devant de la scène. Tout ce qui relevait des économies séquentielles, des transactions hors équilibre. Tout ça a bien existé. Et pour le peu que j'en sais, je reviens à l'argument du technique. Alors, que les physiciens arrêtent un peu et nous pondent des modèles formels riches qu'on puisse leur piquer (comme d'hab, quoi...).
C'est vrai que le concept d'équilibre reste central. Mais puisque vous dialoguez avec des non économistes, il ne faudrait pas leur laisser croire que les économistes sont trop bêtes pour constater ce que même quelqu'un qui n'a jamais fait d'économie pourrait voir facilement...
Toutes les idées importantes, ou presque, ont été préssenties en économie. Reste à faire le tri, approfondir et mettre ça au propre, en quelque sorte. Y avait un article de Malinvaud dans une revue d'économie politique des années 90 (novembre 1996 après vérif) qui parlait de ça justement.
Le côté méprisant ou surpris de certaines personnes vis-à -vis de l'économie est en fait souvent une preuve de leur ignorance.
Désolé, ce commentaire est finalement très long...
mardi, mars 21 2006
15:15
@ Econoclaste-SM : merci de ce commentaire. J'en avais un peu parlé autour de moi, et avais surtout obtenu des non-réponses à base de « il n'a rien compris à l'économie », ou « si on savait traiter les situation hors équilibre, ça se saurait© ». Je vois deux choses à souligner dans votre remarque :
mardi, mars 21 2006
17:18
"Je ne sais pas de ce qu'il en est ailleurs, mais ma propre formation n'a compris aucun cours présentant ou employant les simulations"
— Econoclaste-SMMoi non plus. Mais à l'époque où j'étais en DEA, une thésarde faisait quelques simulations en macro et était respectée (notamment) pour cela :o)
J'en avais déduit que cet objet non identifié qu'était la simulation numérique était respectable.
Quant à ceux qui se moquent du traitement des situations hors équilibre, je ne vois qu'une chose à dire : s'il est vrai que ce n'est pas ce qu'on leur demande en priorité, ils seraient bien inspirés de revoir leur point de vue sur la question. Sans quoi, il faudra en effet accepter les remarques à trois balles des non économistes...
Sur ce point, il y a un effet microcosme, je pense. Ces réflexions viennent-elles de jeunes checheurs ?
mardi, mars 21 2006
17:28
Non, elles venaient d'un chercheur établi dans le domaine de la macroéconomie internationale.
— leconomistemardi, mars 21 2006
18:34
SM acceptera-t-il les remarques à trois balles des gueux non-économistes? Les paris sont ouverts...
— vulgosmardi, mars 21 2006
19:37
leconomiste : un ancien très connu ?
— Econoclaste-SMmardi, mars 21 2006
20:24
Vulgos , ca fait des mois que vous repetez la meme chose sur les different blogs d'economie francais. Et ils vous ont deja repondu.
— NadeMais on sait tous que vous avez vos idees et que vous n'en changerez pas , qu'a Chicago c'est les mechant a la solde du grand Kapital , et que Keynes etait un homme bien.
Je comprend que ca l'ennerve. Moi aussi.
mercredi, mars 22 2006
10:40
Nade: C'est juste. Je vais essayer de me justifier.
— vulgosJe répète la même chose car ils répètent aussi la même chose. Je vais pas changer mon avis sur un discours qui est toujours identique. Que ça en énerve certains, j'en doute pas. C'est le propre des conflits idéologiques, ceux qui partagent vos idées sont contents, les autres sont énervés.
Par contre, ce qu'on pourrait me reprocher c'est de tenir un discours keynésien sur un blog libéral. Là ça serait normal que le proprio du blog s'énerve parce qu'il a son blog pour faire passer son idéologie et il n'a pas envie qu'on vienne le contredire chez lui. J'essaye de m'en empêcher, c'est pas bien. Mais si on dit qu'on est neutre, je comprends pas (du point de vue de la logique je veux dire) qu'on s'énerve.
A vrai dire, dans le fond, je comprends pas qu'on s'énerve dès qu'on se fait contredire. A moins que ce ne soit systématique, contredire pour contredire, du genre je dis A tu réponds non A, je dis non A tu réponds A. Mais comme je tiens toujours la même position, je ne pense pas tomber dans ce travers.
mercredi, mars 22 2006
11:20
@Vulgos : Si vous vous voyez répondre la même chose sur différents blogs, en particulier de la part de personnes qui ne confondent pas économie et idéologie (comme l'équipe d'Éconoclaste, Bernard Salanié ou Antoine Belgodère), il faut sans doute vous interroger sur le bien-fondé de ce que vous dites.
Pour prendre un exemple extrême, vous me faites l'effet de quelqu'un qui voudrait qu'on lui explique en quoi la théorie de l'évolution est supérieure au créationnisme sans vouloir acquérir les connaissances nécessaires en biologie et en génétique. Contrairement à ce que vous présentez, « l'économiste matheux de base » n'existe pas. Les économistes dans leur ensemble sont aujourd'hui conscients des problèmes de robustesses de leurs modèles, et cela se voit dans les publications académiques.
Au point où vous en êtes, vous avez deux choix. Soit vous faites confiance au peer review qui a fait ses preuves dans d'autres domaines (en histoire, pour prendre un exemple hors des sciences expérimentales), soit vous vous lancez dans une formation en économie.
je n'ajouterai qu'une chose : je trouve assez injuste l'exigence souvent entendue que l'économie doive être compréhensible à tout le monde. Il serait absurde de demander la même chose au physicien. Oui, l'économie se doit d'expliquer ce qu'elle trouve, mais le fait qu'un résultat soit compréhensible au profane n'est pas un signe de sa justesse.
— leconomistemercredi, mars 22 2006
17:01
Je ne peux qu'appuyer ce que dit Leconomiste. Depuis le temps que je lit ces blogs, et que je vous lit , vous me faite l'effet d'un lecteur de Marianne qui aurait lu l'anti-manuel d'economie de Maris et qui croit s' y connaitre.
— NadeL'equipe d'econoclaste en particulier vous a deja repondu sur de nombreux points. Mais alors qu'ils ont montre qu'ils n'etait pas fige dans une ideologie, je vous ait jamais vu vous remettre en cause.
Non , pour reprendre Leconomiste, l'economie ce n'est pas simple. Les gens croient que parce que ils y participent tout les jours , ca l'est. Mais non je ne pense pas. ca demande des efforts, et des bases a acquerir.
Si apres des mois, vous n'avez pas fait ces efforts, je comprend que certains soit legerement lasses voir enerves par vos remarques qui remettent tout le temps en doute ce qu'ils peuvent dire , alors qu'ils sont bien plus formes et bien plus au courant que vous.
Peut etre est ce plus clair maintenant?
Ps* Desole pas d'accent au japon.
mercredi, mars 22 2006
22:32
@leconomiste
— EL"je trouve assez injuste l'exigence souvent entendue que l'économie doive être compréhensible à tout le monde. Il serait absurde de demander la même chose au physicien."
Feynman à montré qu'il était possible d'expliquer à chacun la mécanique quantique sans preque aucune équation. Si l'on met la cosmologie à part, la plupart des problèmes de physique peuvent être clairement expliqués en quelques minutes à n'importe quel pékin moyennement intelligent, à condition d'avoir un peu de talent de vulgarisateur. Et la volonté de le faire.
PS : je peux témoigner que les jeunes révolutionnaires du mouvement "Autisme-Economie" n'étaient en rien contre l'usage des mathématiques en économie, mais souhaitaient simplement réintroduire une certaine dose d'apprentissage de l'économie concrète dans l'enseignement. Cette position peut se discuter, mais elle n'a rien à voir avec la caricature qui en a été faite.
mercredi, mars 22 2006
23:47
leconomiste, merci pour ce témoignage très interessant !
— Laurent GUERBYUne anedocte amusante, dans mon milieu professionnel (produits dérivés action) je travaille avec des physiciens et des matheux et il a fallu un petit moment pour que s'impose l'idée que l'évolution des prix de la capacité de calcul rendrait viable des modèles dont la résolution n'a pas de formule fermée ni d'EDP aux dimensions raisonnables, donc Monte Carlo seulement y compris pour les cas "simples". Ce n'est donc pas limité aux économistes.
A noter que j'espère qu'une acceptation plus large par les économistes des méthodes de simulation de type Monte Carlo s'accompagnera de la publication (ou "libération") du code source des simulateurs et des jeux de données initiaux (les diverses distributions calibrées) en parallèle aux papiers ce qui permettra d'éviter des pertes de temps (recoder le machin pour critiquer le papier, bof) et favorisera la collaboration.
Si des économistes ont déjà commencé je suis preneur de liens. Bientot le SETI-socio-économique :).
J'ai déja abordé le problème des données initiales, en effet pour avoir des idées ou simplement calibrer les Monte Carlo d'agents, il faut des distributions completes et non simplement moyenne / médianes. Je l'ai déja dit (et il n'y a pas accord sur le sujet :) mais je ne crois pas vraiment que les règles de protection de la vie privée empêche totalement l'émergence d'un corpus de donnée de ce style, ca doit être plus l'habitude de ne pouvoir distribuer ces données en pratique il y a quelques années, mais l'emergence du net pas cher et du P2P ont changé la donne, reste à changer les mentalités dans le mileu.
Laurent
mercredi, mars 22 2006
23:56
@ Vulgos: Quel discours Keynesien ?
— ElessarA propos: Keynes était libéral, donc l'opposition libéraux vs. Keynesiens n'a pas gand sens.
@EL: La bonne vulgarisation est effectivement possible et nécéssaire, et certains le font d'ailleurs très biens (Cahuc, Krugman etc.).
Le pb, dans mon expérience (très réduite), c'est que souvent quand je m'essaie à la vulgarisation, mon interlocuteur commence à débattre avec moi et m'exposer ses théories "économiques" à lui. Feynman, lui, n'a surement jamais eu à débattre sur le bien-fondé des hypothèses à la base de la mécanique quantique avec des néophytes (sauf des éventuels illuminés). Il explique en termes intuitifs et par métaphores ce que disent les équations, un point c'est tout. Pareil en éco: les fondements et débats actuels de la science économique n'ont pas à être accessibles à tous (tout comme ils ne le sont pas en phyisique). Seuls les éventuels résultats peuvent (et se doivent d') être vulgarisés, étant entendu que c'est à sens unique.
LSR
jeudi, mars 23 2006
00:20
Elessar, vous y allez un peu vite en besogne. Feynman, lui, faisait de la physique, donc avec des expériences répétables, un pouvoir prédictif étonnant, des possibilité de réfutation, et tout cela se transforme en produits concret que tout un chacun peut acheter et utiliser (enfin, aussi passer l'arme à gauche pour le projet Manhattan...).
— Laurent GUERBYMettre l'économie au même plan que la physique, la je pense qu'il y a un vrai problème, non ?
Au passage, je cite wikipedia "Feynman is sometimes called the "Great Explainer"; he took great care when explaining topics to his students, making it a moral point not to make a topic arcane, but accessible to others. His principle was that if a topic could not be explained in a freshman lecture, it was not fully understood yet". A différencier avec "les fondements et débats actuels de la science économique n'ont pas à être accessibles à tous". Belle différence de perspective.
Laurent
jeudi, mars 23 2006
00:28
@Elessar
— NadeOula oula que Keynes eu ete pour le Capitalisme , certe, qu'il soit Liberal, ca se debat franchement! En tout ca je m'avancerait pas a le dire.
jeudi, mars 23 2006
00:57
@Nade: Pourquoi ? Il ne s'est jamais prononcé contre la liberté individuelle ni contre la propriété privée (pour faire court) que je sache, et il avait un mépris hautain pour le socialisme.
— ElessarTout dépend bien sûr de comment on défiit le libéralisme, mais à moins de restreindre le libéralisme aux nouveaux classiques et aux libertariens, je ne vois pas comment on peut dire qu'il n'est pas libéral.
LSR
jeudi, mars 23 2006
01:14
ben eux le dise ;)
— Nadewww.mises.org/story/891
Maintenant je pense que ca se discute. Je l'ai lu ( pas tout ), et j'arrive pas a me faire une idee. Si il etait evidament pro Capitalisme , en faire un liberal type classique ou autre, ca se discute. Plus un socdem peut etre. Je ne sais pas.
jeudi, mars 23 2006
01:50
@Nade: Ben "eux", précisemment, sont "free-marketeers" à donf ...
— ElessarSi libéral="il faut toujours et partout tout libéraliser et privatiser, toute intervention gouvernementale est une spoliation si elle n'est pas consentie à l'unanimité et la propriété privée est un droit absolu et inviolable" alors oui, Keynes n'est pas libéral.
En revanche, si on voit le libéralisme comme un courant philosophique (et non uniquement économique) issu des lumières, plus particulièrement en Ecosse, qui consiste à prendre l'individu, et non le collectif, la corporation, la caste ou la classe sociale comme unité sur laquelle on construit la société, et qu'on lui accorde des droits égaux dans le but de le laisser gérer sa vie et ses choix comme il l'entend, alors Keynes est libéral, tout comme John Rawls et Amartya Sen d'ailleurs.
"Libéral" en France est devenu une insulte vide de sens au point où tout débat devient impossible. Quand je demande a des "anti-libéraux" auto-proclamés si c'est la liberté d'expression, l'habeas corpus ou le principe "un citoyen=une voix" qu'ils aboliraient en premier s'ils étaient au pouvoir, je n'ai droit qu'à un regard vide de compréhension, ils ne savent même pas que la plupart de leurs droits sont issus du libéralisme (note que les juristes sont une exception).
Ceci dit, Keynes avait une attitude très aristocratique vis-à -vis des "classes laborieuses" qu'il ne considérait clairement pas à son niveau, donc son libéralisme est discutable, mais clairement pas pour les mêmes raisons (et ça en fait tout sauf un social démocrate).
LSR
jeudi, mars 23 2006
03:03
Guerby: puisqu'on y est, je te signale que je me suis mis à Octave. J'avance pas mal...
— Antoine Belgoderejeudi, mars 23 2006
05:44
@Laurent GUERBY: Je ne compare pas l'économie à la physique, mais le rôle de la vulgarisation en économie et en physique.
— ElessarQuoi que Wikipedia dise de Feynman, dans ses cours aux freshmen, il faisait forcément de la vulgarisation, ses élèves n'ont pas, et de loin, les moyens de comprendre le formalisme mathématique nécéssaire qui soustend la physique moderne. Les fondements et débats actuels de la science physique ne leur sont pas accessibles. Feynman ne leur donne que quelques explications, métaphores et analogies pour comprendre les intuitions derrière la physique quantique, mais ils sont obligés de le croire *sur parole* qu'une fois traduit en equations et en expériences, ça tient la route. Ils n'ont aucun moyen et aucune légitimité d'entrer en débat avec lui.
En économie, c'est similaire. On peut faire de très très bons cours d'éco à Sciences Po et en prépa HEC voie éco, des cours qui enseignent merveilleusement bien les explications qu'a pu apporter la science économique aux phénomènes économiques ainsi que les affrontements entre différents courants de pensée, tout comme on peut écrire de très bons bouquins de vulgarisation. C'est même absolument essentiel pour que la science économique reste pertinente, peut-être plus important que pour la physique, qui peut un peu plus se permettre de rester ésotérique.
Mais le débat scientifique ne se situe pas à ce niveau, et qui ne possède pas les outils techniques (i.e. mathématiques) et la formation nécéssaire pour comprendre la science économique telle qu'elle est créé et débattue dans la litérature spécialisée n'a pas de légitimité pour intervenir dans le débat scientifique. Tout comme l'avis d'un des freshman de Feynman sur l'existence ou non du Boson de Higgs est sans intérêt, on ne peut exiger de la science économique (contrairement à sa vulgarisation) de rester compréhensible de tout "honnête homme".
LSR
jeudi, mars 23 2006
10:35
N'est-ce pas Feynman qui disait que personne ne peut rien comprendre à la physique quantique? Je pense qu'on mélange plusieurs niveaux de réflexion dans ce débat.
— econoclaste-alexandre- le premier est celui des outils, c'est celui du post de Leconomiste. Les mathématiques constituent un instrument de raisonnement rationnel. Et les mathématiques sont difficiles. Donc il est normal que dans les sciences, on utilise des mathématiques, et il est aussi normal que tout le monde ne comprenne pas. Par ailleurs, la spécialisation scientifique fait qu'au sein même d'une discipline, deux spécialistes de deux domaines différents seront souvent incapables d'utiliser les outils de l'autre. Ceci est valable dans toutes les sciences : leur outillage est nécessairement difficile d'accès.
- Le second aspect est souvent négligé, mais est très important : la science est, par nature, contre-intuitive. Si le raisonnement scientifique conduit à produire des choses que je peut deviner en levant le nez, alors, ce n'est pas la peine de payer des fainéants à glander dans des labos. Toute science contient des connaissances qui ne se "voient pas", qu'on ne connaît pas. L'économie ne fait pas exception à la règle. Des concepts comme l'avantage comparatif, comme la notion d'équilibre général, comme la loi de Say, sont contre-intuitifs. En ce sens, ils se heurtent au sens commun. De la même façon que les conséquences de la physique quantique (une même particule peut être à deux endroits en même temps) ou de la biologie (la complexité issue de la sélection naturelle et non d'un dessein) sont contre-intuitives.
- ce caractère anti-intuitif n'empêche pas deux sortes d'application de la science : la première, c'est l'ingéniérie, l'utilisation de concepts pour fabriquer des choses. Je ne comprends pas la théorie des options, mais un pricer d'options appliquant la formule de black-scholes me rendra service; je ne comprends pas la théorie des enchères, mais je peux demander à Binmore de me concocter une enchère à la Vickrey pour vendre au mieux mon réseau hertzien. Je ne comprends rien à la physique, mais je peux demander à Oppenheimer et ses potes de me fabriquer une bombinette.
La seconde, c'est la vulgarisation, c'est à dire la traduction des conclusions et des raisonnements en langage le plus intelligible possible. L'explication des concepts et des conclusions, même lorsqu'ils ne sont pas intuitifs, en langage clair. Et c'est là que l'économie a un problème, parce qu'elle concerne tout le monde tout le temps. L'économie est l'une des rares disciplines dans lesquelles n'importe quel pégreleux pense que son opinion est tout aussi bonne que celle du spécialiste, et dans laquelle on écoute religieusement n'importe quel crétin raconter des fadaises. Soyons franc : les économistes sont largement responsables de cette situation. Mais le fait est qu'il existe une énorme dose de Do-it-yourself economie, encore plus qu'en médecine. Et que le fait que tout le monde utilise la DIY économie fait que tous les aspects contre-intuitifs de l'économie, tous les aspects méthodologiques sont ignorés par des raisonnements qui s'arrêtent à "je sais que c'est pas vrai". Et ça, c'est une spécificité.
Cela dit, je ne parierai pas pour que l'économie reste longtemps seule dans ce domaine : l'irruption de l'opinion dans pas mal de domaines scientifiques (autour notamment des questions environnementales) promet un triste avenir dans beaucoup de sciences. La DIY biologie est déjà bien en place.
jeudi, mars 23 2006
11:56
Elessar: Keynes était bien libéral, je suis d'accord, un libéral un peu particulier, assez aristocratique, assez proche des idées de Hayek. Ce qu'on appelle le keynésianisme, c'est autre chose, c'est de la social-démocratie. Keynes était pragmatique, scientifique, et pensait que le keynésianisme était la réponse aux problèmes de l'époque, in fine pour sauver le capitalisme. Ce qui ne veut pas dire que le keynésianisme était son opinion personnelle ou ce qu'il souhaitait dans l'absolu. Je pense exprimer là l'opinion commune des historiens de l'économie sur la question Keynes.
— vulgosSur le débat de ce fil, il vaut mieux que je m'abstienne de donner mon opinion, pour ne plus blesser certaines sensibilités, y compris la mienne. Les interventions de EL et Laurent GUERBY l'ont exprimée beaucoup mieux que je n'ai sû le faire (au vu des réactions outrées qui s'en sont suivies).
jeudi, mars 23 2006
12:25
Comme le dit Alexandre, le problème ne vient pas tant de la qualité de la vulgarisation que de l'idée que l'économie de café de commerce du premier venu a autant de valeur que celle que s'est faite un chercheur qui bosse sur le sujet depuis des années. Exemple : quand on dit que les rendements (privés) de l'éducation sont positifs, et qu'on se voit répondre « non, je connais un type qui a un DEA et qui est au chômage ».
— leconomistejeudi, mars 23 2006
22:37
econoclaste-alexandre: une bonne partie des gens extrêmement compétents en informatique ont une formation DIY, et ce depuis longtemps (par le simple fait qu'il n'y avait pas de formation vu la jeunesse du secteur).
— Laurent GUERBYleconomiste, amusante réthorique, pour argumenter votre position vous vous servez d'un seul exemple de quelqu'un qui se sert d'un seul exemple comme démonstration, en suggerant que c'est plutot pas bien, que dois-je conclure ? :).
vendredi, mars 24 2006
16:43
@ Guerby : en informatique, si vous faites un programme foireux, il ne marche pas, ce qui produit un phénomène sélectif assez rapidement. En économie, si vous racontez des conneries, vous pouvez continuer longtemps. En effet, des économistes vous diront : "c'est n'importe quoi". Vous répondrez "les économistes ont le nez dans leurs équations, ils ne savent pas qu'il faut intégrer l'homme, l'histoire, la vie des poneys, ils sont autistes" et vous aurez une audience conquise de gens qui pensent comme vous, et qui trouveront toujours plus facile de dire n'importe quoi plutôt que de se fatiguer à aller lire des livres plein de mathématiques compliquées.
— econoclaste-alexandrevendredi, mars 24 2006
17:15
econoclaste-alexandre : Et quand des économistes disent à d'autres économistes "c'est n'importe quoi", on fait quoi? On mesure la longueur de leurs équations pour les départager?
— vulgosvendredi, mars 24 2006
18:44
Je me permet d'intervenir brièvement dans ce débat pour faire remarquer aux "économistes mathématiciens" que les critiques adressées à l'encontre de ce que j'appellerai la méthodologie standard n'émane pas seulement des guignols d'ATTAC, de Viviane Forrester ou du péquenot moyen qui fait de la "Do It Yourself économie" (jolie expression). Il y a aussi des économistes et des épistémologues très qualifiés, souvent de formation mathématicienne, qui ont une réflexion critique très pointue sur la pertinence de la méthodologie standard. Je pense en France à Bernard Guerrien ou en Angleterre, dans un style totalement différent, à Tony Lawson (entre autres...). Hors, ces gens développent des réflexions très intéressantes (avec lesquelles je ne suis pas toujours d'accord, je le précise) qui mettent bien en valeur certains points problématiques (et qui, je précise, sont déconnectées de toutes réflexions idéologiques). Et, la plupart du temps, la seule réponse des économistes standards c'est : "les questions épistémologiques et méthodologiques n'ont aucun intérêt et sont une perte de temps" (il y a quelques exceptions bien sur, je pense à Frank Hahn par exemple). Ce manque de considération pour certaines thèses épistémologiques "hétérodoxes" sérieuses est dommageable mais il traduit peut être une chose qui, elle aussi, est inquiétante : la très grande majorité des économistes n'ont que très peu de compétences épistémologiques et, s'ils maitrisent leurs outils, ne connaissent (ou font semblant) peut être pas toutes leurs implications.
— Quelqu'un de passagevendredi, mars 24 2006
22:01
Il n'est plus d'ATTAC, Guerrien ? Et il a une thèse épistémologique ? (précision : "l'unicité et la stabilité de l'équilibre ne sont pas démontrées dans le cas général" n'est pas une thèse épistémologique, ni d'ailleurs un résultat de Guerrien, même s'il n'a que ça à la bouche)
— Antoine Belgoderevendredi, mars 24 2006
23:29
Nouvelle variante du fr.wikipedia.org/wiki/Loi... point Godwin : sur un blog d'économie, plus le temps passe et plus la probabilité que quelqu'un annonce que l'économie n'est pas une science augmente.
— Econoclaste-SMEt cette probabilité croît très vite dans le temps.
Corollaire 1 : peu importe quel était le sujet initial, de toute façon l'économie n'est pas une science.
Corollaire 2 : de toute façon, inutile de discuter, l'économie n'est pas une science.
samedi, mars 25 2006
01:12
Qui a dit que l'économie n'était pas une science ? Pas moi, puisque je considère que s'en est une... J'ai mentionné Guerrien, c'était peut être une erreur car il n'a effectivement aucune réflexion épistémologique (ce que je lui reproche d'ailleurs), il y en a d'autres, mais en fait peu importe. De toutes façons ce genre de débats n'a aucun intéret sur un blog puisque chacun campe sur ses positions et que personne n'a envie d'argumenter. Ca fait au moins un point commun aux altermondialeux anti-maths-et-économie-et-capitalisme et aux économistes-scientifiques-matheux... Je précise que pour ma part, je n'ai absolument rien contre les maths en économie, que j'en fais parfois usage etc... La question n'est pas là . C'est juste que l'économie ça ne se résume pas à Attac vs les néoclassiques. Mais bon, caricature et forum font souvent bon ménage !
— Quelqu'un de passage (qui repasse)On pourrait d'ailleurs repérer des régularités dans les réponses des néoc aux hétérodoxes, façon café du commerce :
a) vous ne voulez pas de maths en économie parce que vous êtes nuls en maths
b) pour faire de l'économie, faut faire des maths
c) comme vous êtes nuls en maths, vous ne pouvez pas faire d'économie : circulez, y'a rien à voir, on a raison...
Intéressant, mais est-ce si simple ?
samedi, mars 25 2006
01:28
Quelqu'un de passage : relisez le billet de leconomiste et le début des commentaires, avant que ça devienne polémique. Vous maintenez que c'est un discours de sourds qui campent sur leur position ? Il y a aussi un facteur à prendre en compte : le plaisir. Moi, je prends du plaisir à découvrir l'opinion de ce physicien car elle est assez originale et m'invite à réfléchir. Du coup, ça me donne envie de prendre part au débat, et j'ai l'impression que ça me fait avancer. Lorsque le débat dérive vers des questions que j'entends poser à l'identique depuis des années et que je sens que ça va tourner à la polémique stérile, je préfère me retirer calmement du jeu. D'autres se retirent moins calmement que moi car ils tiennent à exprimer leur frustration, ce qui est compréhensible.
— Antoine Belgoderesamedi, mars 25 2006
07:35
Démonstration ("par l'absurde") du corrolaire 1 :
— Econoclaste-SM"De toutes façons ce genre de débats n'a aucun intéret sur un blog puisque chacun campe sur ses positions et que personne n'a envie d'argumenter."
Proverbe néoclassique : quand l'envie de parler de la scientificité de l'économie te prend au milieu d'une toute autre conversation, gratte toi.
Je constate que j'échangeais placidement et modestement avec leconomiste sur les questions de modèles hors équilibre, quand des individus, probablement des casseurs, sont intervenus sans ménagement pour parler d'autre chose. Alors, qu'on arrête un peu de raconter des conneries sur l'oppression des masses non mathématisées et le fanatisme des néoclassiques. Voilà justement une conversation peu orthodoxe qui a été cassée par les gentils "remetteurs-de-l'homme-au-centre-de-l'économie".
Ou alors, qu'on reconnaisse sans réserves la pertinence de cette nouvelle variante du point Godwin.
Allez, je retourne voir les gens de la tour d'ivoire...
samedi, mars 25 2006
09:01
Oui j'ai vu que la discussion avait efffectivement dévié par rapport au sujet initial. A vrai dire, je suis tombé sur ce blog un peu par hasard (il est bien d'ailleurs) et cette discussion m'a alerté par la virulence de certains propos. Et comme on dit, tout ce qui est excessif est insignifiant... Mais je veux bien croire que certains soient agacés par la rengaine lancinante des DIY economie, dans la mesure où il n'y a aucune argumentation. Tout ce que je voulais souligner c'est qu'on peut avoir une position nuancée et critique sur la méthodologie standard, sans pour autant être un altermondialeux, bille en maths, et soutenir cette position avec des arguments rationnels.
— Quelqu'un de passage (une dernière fois)Bon voilà , je retourne à mon tour dans ma tour d'ivoire...
p.s : sur le fanatisme des néoclassiques, heureusement ce n'est pas le cas d'une très grande majorité. Mais il y en a quand même une paire qui sont bien barrés non ?! ;-)
samedi, mars 25 2006
14:51
AB: "puisqu'on y est, je te signale que je me suis mis à Octave. J'avance pas mal..." tu es plus courageux que moi, il faudra que je m'y mette un jour :).
— Laurent GUERBYmardi, mars 28 2006
02:16
Je reviens au sujet de base de l'article. J'ai eu l'occasion de suivre un cours de finance donné par un physicien venant de la physique statistique et qui s'est reconverti en gestionnaire de fonds.
— svagEtant économiste en cours de formation, son exposé m'a beaucoup impressionné, même si je n'y ai pas compris grand chose. Sa démarche est très différente de celle suivie par les économistes que j'ai eu l'occasion d'entendre sur les mêmes thématiques. Au lieu d'adopter une démarche déductive - je construis un modèle, j'en tire des conséquences testables que je confronte aux données -, il a appliqué une démarche totalement inductive.
Il a commencé par étudier les propriétés du processus stochastique typique que suivent les cours boursiers, en les faisant passer à travers tout un tas de filtres issus de la physique. Il en a déduit la forme générale que doit prendre le processus théorique sous-jacent. Enfin, il a essayé de voir si il pouvait interpréter cette forme théorique en termes de comportements (mais ça semblait une partie accessoire de son raisonnement ou en tout cas pas la plus importante).
J'ai trouvé cette démarche surprenante. Elle s'apparente peut-être à certains travaux en statistique totalement non structurelle mais j'ai l'impression qu'ils restent minoritaires. Pour moi cela s'explique largement par le fait qu'elle ne permet pas de rendre le monde intelligible, de mieux le comprendre mais plutôt de le prévoir sans comprendre les logiques sous-jacentes, ce qui est assez frustrant et se comprend surtout dans la perspective technologique justifiée en physique.
Mais peut-être y aurait il un peu à gagner en utilisant les méthodes développées en physique statistique en complément de la modélisation économique ? (au vu de la complexité des méthodes, je préférerais autant que d'autres que moi s'y collent :) )
Dernière chose (je me rends compte que le post est un peu long) : je veux bien que quelqu'un m'indique dans quels travaux ont été développées (de façon intéressante) des modélisations hors équilibre, parce que je n'en ai jamais entendu parler ?
mardi, mars 28 2006
10:25
L'idée est certes tentante de faire comme Newton : prévoir le mouvement des planètes sans essayer de comprendre ce qu'est la gravitation elle-même. Malheureusement, cela ne marche pas en économie. C'est l'argument de Lucas. S'il est possible de prévoir un comportement, il y a des bénéfices économiques à en tirer. S'il y a des bénéfices, il existe des agents qui seront prêts à altérer leurs comportements pour en profiter. Cette altération se produira jusqu'à ce que la possibilité de faire la prévision devienne suffisamment connue pour qu'il ne soit pas possible d'en tirer profit. L'altération des comportements est donc telle que la prévision est fausse, et que tout est à recommencer.
C'est là un problème récurrent de la modélisation économique : un modèle doit pouvoir garder ses conclusion même en supposant que les agents connaissent le modèle.
— leconomistemardi, mars 28 2006
23:14
leconomiste, une fois que les arbitragistes ont fait leur travail le modèle n'est absolument pas faux : il colle simplement exactement a la réalité et est donc parfait ! Et il n'y a plus d'argent à gagner sur la différence modèle - réalité car elle est nulle :).
— Laurent GUERBYA noter qu'un des phénomènes majeur de l'économie actuellement est la convergence incroyable des rendements des produits financiers des différents secteurs traditionnellement séparés (actions, obligataire, immobilier, ...), et très probablement sous l'effet de la fluidité actuelle des mouvements des capitaux et la sur-financiarisation de l'économie :
www.zacks.com/newsroom/co...
Les financieres representent 20.8% de la capitalisation du S&P500 et 25.9% des profits (sans compter donc les gains financiers des boites classiques comme GM).
Un dernier point (mon dada), les données boursières détaillées sont facilement disponibles ce qui permets de vraiment travailler, mais ce n'est pas le cas données "économiques" détaillées (on a droit qu'a des indicateurs globaux biaisés et de mauvaise qualité, pas aux distributions).
mercredi, mars 29 2006
10:28
Laurent, ce que tu dis n'est vrai que pour les seuls marchés financiers (qui sont le contre-exemple). L'exemple-type est ce qui est arrivé à la courbe de Philips : la relation entre taux de chômag et accélération de l'inflation reposait sur une inflation non anticipée. Dès lors que les salariés se sont rendus compte de ce fait et ont demandé l'indexation des salaires sur l'inflation, la relation (empirique, établie comme en physique) s'est écroulée. Cette expérience a, je crois, considérablement échaudé les économistes quant à l'intérêt des régularités empiriques établies sans référence à un modèle théorique.
— leconomistemercredi, mars 29 2006
15:14
svag : ne perdez pas trop de temps sur le hors équilibre quand même...
— Econoclaste-SMexemple de raisonnement de ce type :
fraise.univ-brest.fr/~fdu...
mercredi, mars 29 2006
18:29
"Laurent, ce que tu dis n'est vrai que pour les seuls marchés financiers (qui sont le contre-exemple)."
— Eric LauriacJe ne comprend pas, sur tous les marchés, les agents font des anticipations. Les marchés financiers ne sont qu'un cas extreme mais pas particulier. Pourquoi y aurait-il une difference avec le marché du travail ?
PS: je ne crois pas du tout à la permanence des modèles, surtout sur les marchés financiers.
mercredi, mars 29 2006
23:20
Eric, la différence est quantitative : la faiblesse incroyable des couts de transaction sur les marchés financiers vs tous les autres marchés. Sinon après tout les agents anticipent et sur le principe il n'y a aucune différence entre ces différents marchés et mécanismes. Au passage, inclure les couts de transaction même en finance ca complique considérablement les modèles, et je ne crois pas que les économistes essaient vraiment d'intégrer ce genre de phénomène (dans leur quête d'équations solubles symboliquement pour épater la galerie).
— Laurent GUERBYPour la "permanence des modèles", même en physique les modèles changent et il n'y a pas d'unification à travers les echelles, donc je ne pense pas qu'on vous contredise sur ce point :).
vendredi, décembre 15 2006
23:02
J'arrive complètement après la bataille, mais je voudrais juste faire une remarque par rapport à ce qui a été dit au début, sur les simulations dans les formations économiques.
— Après la batailleSuivant pour ma part un cursus éco à Cachan, nous avons des cours incluant Monte Carlo (c'est en option, mais ça existe), et la nouvelle direction est en plein dans la théorie du chaos (ne me faîtes pas dire ce que je n'ai pas dis, c'est son domaine de recherche, pas autre chose !)
jeudi, mars 8 2007
21:07
Lorsque ma femme a exposé sa thèse, où elle résolvait analytiquement des systèmes dans des cas simples (symétrie cylindrique, dimension infinie, etc.), avant de procéder à des simulations numériques, on lui a fait remarquer qu'on voyait bien qu'il s'agissait d'une normalienne...
— David MonniauxSon argumentation : les simulations numériques ne donnent pas l'intuition du phénomène, des paramètres caractéristiques; et les solutions analytiques permettent de contrôler que la simulation numérique se comporte bien (si le modèle numérique ne colle pas à la solution analytique dans les cas simples, c'est que l'on a un problème).
Cela me paraît très raisonnable comme attitude. J'ai moi-même tendance à « vérifier » les solutions closes par le calcul automatique et le calcul automatique par les solutions dans les cas simples...