Depuis un petit moment, on voit chez Econoclaste une discussion concernant les deux théories du système scolaire : celle de signal (le système scolaire n'apprend rien, il ne fait que sélectionner les plus productifs) et celle du capital humain (le système scolaire bâtit des acquis de méthodes et de connaissances qui augmentent la productivité).

Dans mes TD, j'ai été frappé par le désintérêt à peu près total que les étudiants avaient pour les contenus que je (et d'autres chargés de TD) voulais leur transmettre. Une seule chose les intéressait : que faut-il faire pour valider cette matière ou cette UV. Ils sont donc dans une perspective de pur signal. Le système autour d'eux, au contraire, structuré par le tabou de la sélection, ne jure que par une perspective de capital humain : quels outils peut-on leur donner pour comprendre le monde, devenir de bons citoyens, et accessoirement les rendre un petit peu employables ?

Par contraste, les élèves de classes préparatoires sont dans une pure logique de signal : peu importe d'en apprendre peu ou beaucoup, il faut en savoir plus, et montrer qu'on en sait plus, que les 1500 autres qui vont passer le concours cette année-là. Pourtant, non seulement les classes préparatoires donnent un acquis de méthodes assez clair, mais en plus les préparationnaires sont en général intéressés par les contenus des enseignements qui leur sont faits, et réagissent vivement face à un enseignement trop vide. Après coup d'ailleurs, de nombreux préparationnaires sont profondément convaincus de la théorie du capital humain.

Peut-être un biais de sélection, ou des déterminations sociales (les préparationnaires sont productifs parce qu'ils ont été éduqués dans l'idée qu'il fallait l'être, ce qui a fait qu'ils ont eu de bonnes notes, ce qui a fait qu'ils étaient pris en prépa), mais je reste assez perplexe devant cette bataille à fronts renversés.