À première vue l'argument se tient : face à une possible sortie de la Grèce de la zone euro, les Grecs ont (individuellement) peu à perdre à retirer tous leur argent des banques - même si collectivement, cela précipiterait la sortie redoutée. En effet, si la Grèce sort, ils échappent à la dévaluation de leur épargne suite à sa conversion forcée. Si la Grèce ne sort pas, ils n'auront perdu au pire que quelques d'intérêts. Alors, pourquoi pas un bank run en Grèce ?
L'auteur du billet met en avant des motifs de patriotisme et d'incrédulité à l'idée que la Grèce puisse sortir de l'euro. Ces facteurs sont indéniables. Mais j'en vois un autre : la valeur des euros retirés est tout sauf garantie.
Dans le chaos suivant une sortie de l'euro en effet, l'État grec pourrait probablement annoncer des contrôle de capitaux drastiques : interdiction de sortir des euros sans une supervision bureaucratique de chaque transaction, interdiction (évidemment) d'accepter l'euro comme moyen de paiement, ce qui en soit limite la possibilité d'utiliser les euros retirés par précaution. Le gouvernement pourrait sans doute aller plus loin et interdire la détention d'euros, soumettant tout contrevenant à une amende, la confiscation de ses euros ou une conversion forcée à un taux dérisoire.
Je conçois que cela puisse paraître lointain et très étrange à un chroniqueur venu de pays où de tels contrôles n'ont plus cours depuis longtemps. Mais rappelons que dans les années 1980 encore, l'achat de dollars par des Français était réglementé, et qu'à la même époque, la Grèce était une dictature militaire. Ce qui donne peut-être aux Grecs une meilleure mémoire de la composition de l'arsenal répressif d'un pays qui a décidé de rompre ses accords internationaux.