Session parallèle 1 : Books 1

Svanhild Aabø : "Public libraries and urban development"

Un papier un peu étrange. Il part du constant qu'en Norvège, la majorité des personnes utilisant les bibliothèques n'empruntent jamais d'ouvrages (voir ce billet sur un sujet proche). Que viennent-ils faire ? Sur la base d'entretiens, il apparaît qu'il s'agit le plus souvent de personnes socialement défavorisées qui trouvent dans les bibliothèques un lieu de rencontre et de travail (accès Internet gratuit) où ils ne se sentent pas socialement ostracisés. Les bibliothèques jouent ainsi un rôle d'inclusion sociale de ces personnes.

La discussion est faite par Knut Løyland, qui se demande s'il existe un effet d'éviction du public traditionnel des bibliothèques par ces publics, et si d'autres lieux ne seraient pas plus efficaces comme lieux d'intégration sociale. Svanhild Aabø ne répond pas à la première question, et pour la seconde met en avant le fait que les bibliothèques sont un des rares lieux publics qui attirent des personnes provenant de pratiquement toutes les couches de la société.

Knut Løyland and Vidar Ringstad : "Borrowing demand from public libraries in Sweden"

L'exercice est ici beaucoup plus standard : il s'agit d'une étude microéconométrique de demande pour les emprunts de livres, incluant le prix des livres sur le marché primaire, les revenus et les temps de transport pour accéder à la bibliothèque. Le stock et le flux de nouveautés ont, de manière logique, un effet important sur le nombre d'emprunts, de même que le prix sur le marché primaire (sauf pour les ouvrages pour enfants). De manière moins attendue, l'élasticité par rapport au revenu est négative, ce qui fait de l'emprunt de livres un bien inférieur. Cet effet est accentué avec le temps de transport. L'existence de bibliothèques a donc un effet redistributif bénéficiant aux publics suffisamment intégrés pour les utiliser.

Un des participants fait à juste titre remarquer que toutes les grandeurs devraient être normalisées par la taille des ménages, donnée qui n'est malheureusement pas disponible au niveau de désagrégation utilisé.

Stéphanie Peltier and François Moreau: Looking for the Long Tail: Evidence from the French Books Market

Le propos du papier est de tester l'hypothèse de longue traîne sur le cas des livres en France. L'outil est une régression par quantiles sur des données obtenues par l'institut GfK depuis les années 1990. Des résultats intéressants :

  • Il y a un transfert des vente de la tête vers la queue de distribution sur la période
  • Ce transfert pourrait s'expliquer comme un effet mécanique de l'augmentation du nombre de titres, qui augmente le nombre de titres dans chaque quantile. Si on contrôle pour le nombre de titres, il y a toujours un transfert, depuis les seuls 0,01% des titres les plus vendus vers les quantiles inférieurs.
  • Les ventes en ligne sont moins concentrées que les ventes classiques.
  • L'écart entre les ventes en ligne et hors ligne augmente dans la période, ce qui suggère fortement que la longue traîne n'est pas un phénomène transitoire lié à la composition de la population des premiers clients des libraires en ligne.

Dans ce domaine, la longue traîne existe donc, même si ses effets économiques ne semblent pas se faire sentir dans la structure du secteur.

Note en passant : le papier cite des référence intéressantes sur la manière dont les outils en ligne pourraient renforcer les cascades informationnelles et ainsi augmenter la concentration des ventes, à l'opposé de la dynamique de longue traîne.

Session parallèle 2 : Copyright 2

J'ai été beaucoup moins attentif lors de cette session. En fait, j'étais en train d'écrire le précédent billet de cette série. Je n'ai donc suivi les présentations que d'un œil distrait.

Lillà Montagnani et al. : "Models for managing intellectual property rights on the Internet: Online distribution fo digital media content"

Le premier papier faisait du datamining sur les modes de distribution en ligne de contenus numériques, en termes de DRM et de formes de tarification. Je n'ai pas réussi à saisir de résultat clair du papier, qui semble s'arrêter à obtenir une topologie sans en tirer une structuration forte du marché.

Daniel Nordgård : "Understanding the digital revolution's impact on the record industry: present and future"

Ce papier procède d'entretiens avec des acteurs du secteur de la musique. Il n'a pas de fil directeur fort, mais quelques remarques intéressantes. D'abord, on constate (paraît-il) une baisse significative des échanges de fichiers entre 2008 et 2009, et aucun effet sensible sur les ventes de disques dans le pays considéré : les sites de streaming (Deezer, Spotify) pourraient avoir agi comme substitut des échanges P2P. L'auteur remarque aussi que du propre aveux de ses interlocuteurs, la situation n'est pas si noire que cela : le secteur semble s'être stabilisé à son niveau de 1991, soit avant la massification du CD. Une hypothèse de l'auteur est que c'est en fait le CD qui explique ce qui se passe en ce moment : le CD permis aux éditeurs de musique de convaincre les consommateurs de payer plus pour leur musique qu'à l'ère du vinyle, arguant d'une technologie supérieure. On serait maintenant sortis de cette illusion.

Suite à une annulation, la session s'arrête là, ce qui laisse un peu de temps pour une discussion intéressante avec Ruth Towse sur l'écart entre les conditions faites aux artistes musicaux et celles faites aux auteurs de livres par les plates-formes.

Soir

Très agréable concert vocal par la chorale de l'université de Copenhague, à laquelle j'arrive en retard, m'étant trompé d'endroit (l'Université a des bâtiments un peu partout dans le centre, qui heureusement est assez peu étendu). Deux verres de vin après, je rejoins un ami Danois rencontré au cours de mon séjour au Japon il y a cinq ans.