Les prix Nobel d'économie
En rentrant de vacances, j'ai fini l'ouvrage d'Emmeline et Jean-Édouard intitulé Les prix Nobel d'économie, dans la collection « Repères » à La Découverte. Un ouvrage de première référence fort utile.
Il y a beaucoup à dire sur le thème des prix Nobel d'économie. Emmeline et Jean-Édouard ont eu le mérite de trancher dans les débats creux sur le statut exact de ce prix pour aller à l'essentiel : qui sont les récipiendaires, quels sont leurs apports et pour quelle partie de ces travaux ont-il été récompensés ? Exercice fort utile, puisqu'il n'existait pas d'ouvrage le réalisant convenablement en français (le seul ouvrage existant commettant des erreurs grossières tant sur l'orthographe des noms que sur le contenu des travaux).
Après une introduction présentant l'essentiel de l'historique et du mode d'attribution de ce prix, les auteurs distinguent trois périodes dans la politique d'attribution, qui servent d'articulations pour la suite. La suite en question fournit, sur une base chronologique, la biographie et un aperçu des travaux des lauréats. La minceur du volume (le format habituel de la collection) ne doit pas occulter le travail considérable des auteurs, qui ont fait l'effort de remonter aux articles originaux des auteurs récompensés.
Par nature, le format impose beaucoup de concision. Plutôt que de trop en dire, les auteurs ont su mettre en évidence l'apport conceptuel de chaque auteur, et fournir les références nécessaires à un éventuel approfondissement. Ce genre d'exercice impose naturellement des raccourcis qui font certes dresser le sourcil du spécialiste du domaine concerné mais permettent à mon sens de comprendre les idées essentielles dans les nombreux domaines déjà couverts par le prix. Des encadrés parsèment les fiches pour apporter des perspectives longitudinales, ou rapporter des anecdotes mettant un peu de vie dans ce paysage académique. De ce fait, l'ouvrage est bien plus plaisant à lire que ne le laisserait penser l'aspect de fiches, bien soutenu par une plume alerte des auteurs.
À l'intérieur même de chaque fiche, chaque auteur est également situé dans l'ensemble du paysage de recherche dans lequel il s'inscrit, ce qui permet de bien s'y retrouver entre les différentes écoles et chapelles, et de percevoir les continuités entre auteurs qui ont parfois travaillé dans des domaines assez différents.
Il s'agit ainsi d'un ouvrage de référence très agréable, de bonne facture, dont je conseille la lecture. Par égard pour les auteurs, j'ai même réussi à juguler mes envies de le piller intégralement pour enrichir les entrées Wikipédia sur les différents économistes concernés.
Publié le dimanche, avril 26 2009, par Mathieu P. dans la catégorie : Notes de lecture - Lien permanent
Commentaires
lundi, avril 27 2009
12:49
Je pense que les auteurs seraient fiers de se retrouver cités en "notes et références".
— DClundi, avril 27 2009
16:53
Etant l'un des deux heureux gagnants du grand jeu concours Mafeco, je me dois de faire un commentaire du livre. J'espère que personne ne voit d'inconvénients à ce que je le fasse ici.
— Thomas-Dans l'ensemble il possède toutes les qualités d'un repère : agréable à lire, clair, riche... mais aussi les "défauts"(si je puis m'exprimer ainsi) dûs à l'obligation de concision : trouver résumée en une page 'oeuvre de Arrow fait un peu mal au coeur...
Le choix de traiter les auteurs l'un après l'autre s'imposait mais le manque de fil conducteur inhérent au sujet traité rend difficile l'assimilation des informations (c'est un avis personnel). J'avais lu un livre du même genre sur les grands mathématiciens qui m'avait fait la même impression : on lit, on lit et au final on ne retient que ce qui touche les Nobels que l'on connaissait déjà. Mais je répète, cette critique est personnelle et inhérente à la structure choisie. Emmeline et J-E sont saufs !
Quelques remarques :
1-La démonstration du premier théorême de l'économie du bien-être m'a un peu perdu. Tout d'abord il est dit que c'est Hicks qui l'a démontré ; deux pages plus loin c'est Arrow ; mais on comprend finalement quelques pages plus loin quand on apprend qu'il l'ont démontré ensemble.
2- p28 "dommage pour l'économie que Hayek s'en soit éloigné" ---> c'est une façon de voir les choses.
3- Quelqu'un pourrait-il enfin m'expliquer pourquoi dans tous les manuels et livres que je trouve lorque les auteurs parlent de Milton Friedman, ils ne peuvent s'empêcher de rajouter derrière "chef de file du courant monétariste"?!
lundi, avril 27 2009
21:36
J'ai pré-commandé ce "Repères" sur Amazon dès que j'ai eu connaissance de sa parution prochaine et j'avoue avoir été un peu déçu par sa lecture et avoir un peu peiné à aller jusqu'au bout. Pourtant, l'analyse économique m'emballe le plus souvent. En même temps, en le refermant, je me suis dit bêtement "Mais tu t'attendais à lire quoi exactement en commandant ce livre ?!" (Je crois, naïvement sans doute, que j'attendais de l'ouvrage qu'il explique à, disons, l'honnête homme, en quoi les travaux de tous ces économistes nous aident à un peu mieux comprendre le monde quotidien qui nous entoure et/ou notre passé et en quoi il peut faire de nous des individus preneurs de décisions un peu mieux informés ou avertis ; en un sens, le texte de Colliard et Travers le fait mais peut-être pas de la manière la plus appropriée pour le lecteur que je suis...) Ce type d'ouvrage en effet n'existait pas avant et il comble un vide probable. Le travail sérieux et clair de rédaction a en effet dû être important et la contrainte de concision a probablement dû être assez forte, d'où un ouvrage assez dense et assez technique par rapport à d'autres "Repères", pas toujours aisé à lire. En revanche, les encadrés donnent de l'air, ce qui permet un peu de souffler. Je partage plutôt l'avis ci-dessus de Thomas sur ce qu'il appelle le manque de fil conducteur et sur ce qu'il dit quant à ce que l'on retient finalement après avoir refermé ce livre. Bien sûr, comme l'a bien dit Destouches : "La critique est aisée et l'art est difficile."
— MoggioSinon, je n'ai pas la réponse à la question 3 de Thomas. Au fait, c'est qui Milton Friedman ? ;-)
lundi, mai 18 2009
21:35
L'idée géniale est d'avoir tenté un découpage en quatre périodes afin de mettre en avant la cohérence historique de la distribution des prix.
— YannickToutefois, c'est vrai que c'est un livre qui s'adresse plutôt aux économistes qui connaissent déjà bien leur champs (et notamment la myriade de sous-domaines) plutôt qu'au grand public. Mais encore une fois, pouvait-il en être autrement ?