Voici l'extrait significatif du mail :

Voici copie d'un communiqué AEF qui ne manquera pas de vous donner de l'urticaire. N'hésitez pas à faire circuler.

Amicalement

Les obligations de service des enseignants-chercheurs, qui datent de 1984, "ne correspondent plus à la réalité" (CDUS) La répartition des missions des enseignants-chercheurs devrait se faire "sur la base d'un projet contractuel", préconise la CDUS (Conférence des doyens et directeurs des UFR scientifiques), à l'issue de son 12ème colloque qui s'est tenu du 25 au 26 octobre 2007. La répartition des missions devrait être "arrêtée par le conseil d'administration sur proposition de la composante de rattachement".

Pour la CDUS, "un universitaire n'a pas à réaliser toutes les missions de l'université en même temps, ni même à un moment de sa carrière. Il peut même n'en remplir qu'une seule pendant une période donnée." Les obligations de service sont actuellement fixées par un décret de 1984 mais elles "ne correspondent plus à la réalité de nos missions et, en sciences et technologies", elles "pénalisent fortement l'expérimentation", pointe la CDUS.

Les enseignements de première année "doivent être attribués prioritairement aux enseignants-chercheurs les plus expérimentés", estime par ailleurs la CDUS.

*SORTIR DES 192 HEURES DE TD*

"Il faut sortir de la contrainte des 192 heures de TD devant les étudiants." Sur ce point, la loi LRU "apporte une possibilité de souplesse" puisqu'elle prévoit que le CA définisse "les principes généraux de répartition des obligations de services des personnels enseignants et de recherche".

Pour la CDUS, le service d'enseignement "en présence d'au plus 40 étudiants" devrait être établi selon l'équivalence "1 heure de cours = 1 heure de TD = 1 heure de TP". Et lorsque les effectifs sont supérieurs à 40 , "1 heure de cours = 1h30 de TD". De plus, lorsqu'un enseignant-chercheur est actif en recherche, son service d'enseignement en présence des étudiants ne devrait pouvoir "excéder un volume horaire fixé nationalement qui devrait faire l'objet d'une baisse significative par rapport au service standard actuel de 192 heures".

*EXPÉRIENCE EN ENTREPRISE*

La CDUS souhaite qu'au cours de leur formation, tous les doctorants bénéficient d'une expérience d'enseignement obligatoire ainsi que d'une expérience en entreprise. Et lors de son expérience d'enseignement, tout doctorant, en particulier tout moniteur, devrait être "mis en doublon en travaux pratiques ou en travaux dirigés avec un enseignant chevronné".

"Il faut faire de la première année de recrutement une véritable année de stage", demande la CDUS. Au cours de cette année, "un demi-service d'enseignement doit être confié au stagiaire". Le stagiaire doit bénéficier "de l'aide d'un référent parmi les enseignants expérimentés". En fin d'année, "un bilan sera demandé au stagiaire ainsi qu'au référent". Ce bilan "pourra conditionner la titularisation et l'allégement de la deuxième année". En deuxième année, un tiers de service pourrait être accordé en allégement de service d'enseignement, "selon le bilan de la première année et sur la base d'un projet d'enseignement et de recherche pour l'année à venir".

*ÉVALUATION DES ENSEIGNANTS-CHERCHEURS*

Au cours des quatre années qui suivent son recrutement, un maître de conférences "ne doit pas assumer de responsabilités autres que son enseignement et sa recherche", insiste la CDUS. Les conditions doivent lui être données "pour qu'il puisse effectuer correctement sa recherche, obtenir une PEDR (prime d'encadrement doctoral et de recherche), et faciliter sa préparation à l'HDR (habilitation à diriger des recherches)".

Concernant l'évaluation des enseignants-chercheurs, la CDUS estime qu'elle doit se faire localement, "c'est-à-dire là où l'on peut réellement apprécier l'activité, sauf pour ce qui est de la recherche". L'évaluation faite par les pairs "est plébiscitée, elle passe par une confrontation entre l'évalué et les évaluateurs". Elle doit servir d'abord à "vérifier que le contrat a bien été rempli quantitativement". Elle est un "préalable indispensable" à l'élaboration d'un nouveau projet et donc d'un nouveau contrat individuel.

L'évaluation positive doit entraîner un bonus, soit immédiat (primes, intéressement, accès à certains moyens), soit différé (promotion), conclut la CDUS.

La CDUS est la Conférence des doyens et directeurs des UFR scientifiques.

Les obligations de service

Très honnêtement, loin de me donner de l'urticaire, ce que dit la CDUS me semble bel est bon. On peut logiquement penser qu'un jeune chercheur n'a pas le même arbitrage entre enseignement et recherche, et que la préférence pour l'un ou pour l'autre peut évoluer au cours de la carrière. Hors, aujourd'hui, un universitaire n'a qu'une option, celle de demander un détachement au CNRS, ce qui pénalise naturellement les jeunes chercheurs. La proposition de faire des expérimentations ne peut qu'intéresser l'économètre.

Là où j'enrage vraiment, c'est à l'idée que certains jugent inacceptable la suggestion de confier prioritairement les premiers cycles aux enseignants chevronnés. Serait-ce donc qu'enseigner en L1 et en L2 est infâmant pour quelqu'un parvenu à la haute qualité de Professeur des Universités ? Si les scientifiques font cette proposition, c'est qu'ils ont a cœur d'attirer les étudiants en premier cycle, et pas seulement de se créer une cours de jeunes chercheurs dociles. Confier, comme cela se fait assez systématiquement, les premiers cycles aux enseignants les plus jeunes, encore le nez dans leurs sujets de thèse et sans expérience solide de l'enseignement alors que le L1 et le L2 sont des étapes cruciales d'intégration (ou non) dans le système universitaire conduit aux résulats qu'on sait. Pas par mauvaise volonté des jeunes, mais parce qu'ils ont aussi leur place à trouver.

Les 192 heures

Si j'ai déjà dit que la modulation de la charge globale me semblait bonne, j'hallucine complètement à l'idée que dans les humanités, on ne veuille pas revenir sur la définition des horaires. En effet, en Littérature, en Langue ou en Histoire, les TD ne sont pas vraiment des travaux dirigés, mais de véritables cours, dont les chargés de TD choisissent souvent seuls le programme, devant un public dépassant souvent les 40 étudiants. N'est-il pas alors légitime de se demander ce qui sépare le chargé de TD et l'enseignant en charge du cours magistral, pour qui chaque heure de présence compte pour une heure et demie de TD ?

Il faut noter tout de même que la CDUS fait sans doute erreur dans sa lecture de la loi LRU. EN effet, la citation correcte est que le CA définit « les principes généraux de répartition des obligations de services des personnels enseignants et de recherche dans le cadre des contraintes statutaires ». Or, à l'heure actuelle, les contraintes statutaires sont rigides.

Expérience en entreprise

« Entreprise », manifestement le mot qui fâche est lâché. Pourtant, là aussi, il y a une grande clairvoyance des scientifiques, qui sont conscients qu'une partie significative de leurs doctorants feront de la recherche dans le privé, et que leur devenir sera d'autant plus favorisé qu'ils auront un contact avec ce monde à leur actif. Quoi de choquant à cela ? Évidemment, dans les matières où elle existe, l'agrégation sert de super-assurance-chômage, qui permet à aux enseignants d'inciter, en toutes bonne conscience, de nombreux jeunes chercheurs à faire une thèse sans se préoccuper le moins du monde de ce qu'ils feront ensuite, s'ils ne perdent pas quatre ans (souvent plus) de leur vie à être sous-payés et à servir de petites mains corvéables à merci.

De même, je ne comprends pas qu'on puisse ne pas vouloir que les moniteurs de première année ne soient pas abandonnés devant leurs TD, sans accompagnement, et que leur fonction pédagogique, dont on réclame tant qu'elle soit prise en compte, ne fasse pas l'objet d'une évaluation. Là encore, ce qui gêne est-il de demander à des enseignants chevronnés de descendre dans l'arène des TD pour voir à quel point leurs magnifiques cours magistraux sont en décalage avec ce qu'en retiennent les étudiants ? Ou, encore pire, est-ce l'idée qu'un autre enseignant pourrait être en position de se rendre compte que son collègue ne donne ni programme ni instruction à ses chargés de TD ?

Évaluation

Le point précédent me mène à celui de l'évaluation. Sur ce point, la CDUS met pourtant bien l'accent sur une évaluation par les pairs, qu'on pourrait penser consensuelle. Quel est donc le problème ? De favoriser les enseignants-chcercheurs qui font de la recherche et de l'enseignement plutôt que ceux qui vont, à droite et à gauche, manger à tous les râteliers en négligeant leurs étudiants ?

On l'aura compris, lire que ces suggestions sont inacceptables me hérissent le poil. Elles le font d'autant plus que j'ai l'impression de comprendre pourquoi elles gênent : c'est qu'en Lettres, en Langues, en Histoire et certainement dans d'autres matières, le Professeur est de Droit Divin, au-dessus de toute critique, jouit (et souvent abuse) d'un pouvoir absolu sur ses doctorants (citons le cas d'une monitrice à qui on a fait faire, sans aucune compensation, le triple de sa charge horaire, sous la menace de saboter sa thèse). Dans cette situation, on ne peut que comprendre leur opposition à toute idée de lleur faire rendre des compte, ou de suggérer à leurs élèves que face au chantage à la thèse, au financement ou au poste, il existe, tant dans la fonction publique que dans le secteur privé, des postes où leurs compétences seront tout aussi bien si ce n'est mieux valorisées.